Troisième portrait : Le portrait du Passé

Il a de grands yeux larmoyants

Il nous regarde implorant

Plus nous nous éloignons de lui

Plus il cherche à attirer notre attention

Il fait des grimaces

Il fait de gigantesques

moulins avec ses bras

Il crie des insanités

ou alors il essaye

la dernière blague à la mode

Plus nous courons le monde

A la recherche des amis disparus

Plus il s'accroche à nous

Il est comme le rétroviseur

Toujours face à nous et toujours derrière nous

Il a ce don d'ubiquité

D'être en avant pour nous attrister

D'être en arrière pour nous sourire

A moins que ce ne soit l'inverse

Il danse avec le futur pour moquer le présent

Il nous faut sans cesse le piétiner

Le marteler pour le graver

dans le marbre qui glisse sous nos pieds

Pour l'inscrire en lettres de plomb

Sur le chemin qui fuit au devant de nous

Il est heureux et se plaît à me tendre les bras

Depuis qu'elle a fermé les yeux

Depuis qu'elle a fait volte face

Depuis que les images de son âme

Sont tout ce qui me reste

mais pour combien de temps

Car le passé à cette grâce

d'absorber tout ce qu'elle fut

pour le jeter au loin

comme des mauvais détritus

qui encombrent l'asphalte

Sur laquelle on lance les bolides

Car la vitesse est tout ce qui nous reste

pour croire encore un peu

pouvoir échapper à l’œil

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