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Le voyageur internautique
14 février 2015

Des nouvelles du royaume des morts

Lettre onzième

Ils étaient tous là. Je ne les connaissais pas, mais je savais qu'ils m'attendaient. Silencieux, posés là, patients. Aucun ne s'est précipité vers moi. Solange était placée en avant. Juste quelques pas. Et tous les autres derrière. J'ai su de suite ce qu'ils désiraient. Tout comme Solange, ils voulaient que j'entre en contact. Que je vienne les délivrer d'un poids. Tous ont besoin que je les déleste d'une idée qui les appesantit dans le sol, qui les aliène à la terre, qui les gonfle de cette poussière noire. Ce ciment de l'âme. Ils ont l'éternité pour eux et moi, je dois le trouver, lui. Je savais au départ quel but je me devais d'atteindre. Mais c'est une femme, Solange, qui s'est présentée à moi. Une sorte d'initiation. Maintenant qu'ils ont vu, qu'ils savent mon pouvoir, ils ne me laisseront pas en paix. Il y a un vieux qui me rappelle très vaguement quelque chose. Mais c'est difficile à d'écrire précisément puisque je les sais d'une toute autre façon. Eux tous, je les ai appris de l'extérieur, comme on apprend une leçon de l'école élémentaire. On ne sait pas ce qu'elle signifie exactement, mais on en comprend les atours. J'ai pénétré leur âme. Vous croyez que l'âme a à voir avec l'intériorité, c'est une erreur profonde. L'âme n'est qu'extériorité, voilà pourquoi elle rattache les habitants de l'outre-monde à leur vie d'avant.

Une quarantaine. Ils sont une bonne quarantaine à attendre ma visite ! Je ne me sens vraiment pas de refaire le chemin avec chacun deux, de revivre ce que j'ai vécu en présence de Solange. C'est le vieux qui m'a attiré à lui. Il a déformé la courbure du sol. J'ai bien tenté de reculer. Mais plus je cherchais à mettre de la distance entre nos deux corps, plus le sol se déformait et par voie de conséquence, je m'alourdissais.

Depuis, je sais comment il se nomme : Camille. Et je sais la terre et la roche que je vais devoir combattre. Et la poussière. Et la suffocation. Encore et encore. Comment vais-je pouvoir supporter, ne serait-ce qu'une seule fois une telle destruction. Alors pour tous ces êtres de l'outre-monde, je déclare forfait.

J'ai rendez-vous avec Arturo pour lui dire ma décision. Il n'est pas là. Je dois laisser l'article au marbreur. Arturo m'avait prévenu. « Un jour, je devrais m'en aller quelques jours, il faudra t'adresser à Miguel, le marbreur. Et à lui seul. Sinon je ne réponds plus de la publication. » Ça m'a semblé étrange comme réponse. Mais en effet, je suis tombé, presque par hasard, sur ce Miguel, une espèce de baroudeur. Une méchante balafre en travers de la figure. La musculature saillante. Un gars de la légion. Enfin, si l'on s'en tient à ses tatouages. Il ne m'a pas dit un mot. Il m'attendait, devant l'entrée principale. L'œil soupçonneux. J'ai bien cru un instant qu'il allait me zigouiller. Non, il a juste sorti son surin pour se curer les dents, puis il m'a salué de deux doigts portés au front. Bêtement, j'ai fait pareil, ça la fait sourire. Je crois que finalement, c'est un chic type (lettre 12).

Le visiteur de l'outre-monde

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