Chronique scandinave n°6
Chronique Lofoténienne n°6 (retour sommaire des chroniques)
Petit matin naissant, la pluie fait de petits cercles dans l'eau qui baigne chaque petit port de pêche. Un joli clapotis rassurant avant que ne souffle la bourrasque. Blottis les uns contre les autres, minuscules statuettes d'argile, le nez au vent, nous cherchons dans la brume les monts fièrement dressés d'hier. De peur d'être balayés par le souffle que dégueule la Norskehavet, sœur Iroise d'une autre mer, ont-ils préféré gagner le large et tels des montagnes de glace dériver en des cieux plus cléments ?
Il ne reste que quelques dents de requin, molaires et incisives, plantées en une gigantesque mâchoire d'Erin dont on ne distingue aucunement la dentition haute. Ce gouffre béant voudrait croquer la poignée de maisons qui résistent fièrement à l'avalement. Minuscules, elles sont déposées à même le sol tout au bord du ciel, reflet vert émeraude de l'en haut.
Mais quelle est cette terre d'Irlande emportée là par je ne sais quel déluge ? En poignées, les épaves rocheuses s'accrochent comme elles peuvent à la côte. Puis vient l'eau, si claire, aux couleurs équatoriales, palanquées de bleu céruléen qui court au gré d'un sable immaculé. Et s'en vient le socle de roche d'un éclat verdoyant qui ferait blêmir nos prairies de Normandie.
Voici que mon âme délétère s'est déposée là, aux pieds de l'écrin floral que compose la végétation luxuriante dévorée gaiement par les brebis égarées. Il ne restera de moi qu'une pluie venteuse barrant l'horizon de raies de brume.
Ombreuses pensées comme vous fûtes vilaines, je vous ai chassées. Au loin. Et je vous ai crié de ne plus revenir. Maintenant, je reste seul au bord de la jetée sans rien d'autre à faire que regarder passer les embruns. Désoeuvré.
Photos que, un jour, si je ne sais plus où j’habite, j’irai là juste pour regarder par la fenêtre !
Celle-ci n’est pas de moi, mais de Muriel, et Muriel, contrairement à moi, elle sait faire de jôlies images qu’elles sont belles !