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Le voyageur internautique
24 mars 2015

19 heures c'est à nouveau l'heure du feuilleton ! épisode 45

maurepas4 n°45

Les tribulations de Maurepas
Troisième partie
Le vent du large.

Épisode 45

Tout ce qu’il avait pu faire, ce fut d’aller chercher de l’eau. De retour, Mantine avait nettoyé la plaie. Pour se donner une contenance, pour éviter les mots inutiles, les explications bancales. Que pouvaient-ils faire contre l’inéluctable. Tous les deux appartenaient à Arturo, elle pour avoir le droit de tapiner sous protection et lui parce que dans ce trou à rats, il n’y avait pas d’autres possibilités pour gagner de quoi vivre. Elle aurait voulu lui dire de se méfier, que la contrebande avec Arturo, c’était risqué, qu’il lui serait redevable doublement. Pour s’être installé chez une putain qui lui appartenait, et devoir son argent au trafic.  Elle aurait pu lui dire que l’opium qui transitait par le port, c’était très risquée. Mais d’une certaine façon, moins Maurepas en savait mieux c’était. Il se doutait bien que ce n’était pas très honnête tout ça, mais il avait l’habitude de ne pas poser de question. Ses origines paysannes, le rapport à la terre, faisaient qu’on effectuait sa tâche, un point s’était tout. Le pourquoi du comment, ça appartenait au curé, le reste, le Bon Dieu s’en occupait.

La nuit suivante, il s’endormit dans les bras de Mantine, ils firent l’amour, pour ne pas se parler, c’était plus commode. Elle se donna, il se perdit dans ses bras, voilà tout. Les jours suivants se succédèrent dans une ronde morose. Ils ne firent plus l’amour, il continua une à deux fois par semaine à donner un coup de main pour le trafic. Soit à décharger de nouveaux arrivages, soit à les rapatrier dans le hangar pour les négociations. Maurepas n’assistait pas à cette partie du trafic, il se contentait d’apporter sa force pour le transport.

Le reste du temps, il le passait au bistrot avec la bande de lascars, ou bien à assis sur le quai, les jambes pendantes à rêvasser. Le vent du large, les embruns, la brise légère, l’odeur iodée de l’air qui vibrait à cause de la chaleur, ravivaient une plaie qui ne pouvait se refermer. Le trois-mâts avait quitté la rade depuis quelques jours, mais aucun autre bateau ne venait mouiller. Maurepas voyait ses espoirs de haute mer, de voiles claquant au vent, de fond de cale et de haubans s’évanouir. L’appel de l’océan remplissait encore son esprit, l’envie d’aventure, de dépaysement, tout cela continuait à le nourrir, pourtant.

Un matin, Arturo vint lui-même le chercher chez la Pipette. Il entra sans frapper, comme s’il était le maître des lieux. Maurepas eut juste le temps de sauter du lit et d'enfiler son caleçon. 

- J'ai besoin de toi. Habille-toi fissa !

Bien au chaud, toujours sous le drap Mantine regardait la scène se dérouler sous ses yeux. Comme un spectateur qui n'est pas directement concerné et qui attend la fin de l'acte un.  Ou bien, elle jouait le rôle de l'absente.  Celle dont on parle, ou alors qu'on ignore. 

Les affaires de Maurepas étaient soigneusement pliées sur la chaise à droite de la porte d'entrée. Arturo attrapa le tout négligemment, puis l'envoya par-dessus le lit vers Maurepas.  Les fringues lui arrivaient à hauteur de la figure, il les chopa au vol. Chacun d'un côté du lit, se faisant face, il ne manquait plus que les revolvers à la ceinture pour un mauvais western. 

Une fois habillé, Maurepas lorgna du côté de la paillasse.  Arturo saisit l'intention de Maurepas.

- Va au bar, tu commandes ce que tu veux, tu mettras ça sur mon compte. 

Maurepas allait quitter la pièce, mais Arturo tendit le bras pour l'arrêter. Maurepas se faufila le long du mur, se tourna dos à la porte. 

- Dis aux autres de se tenir prêts… Qu'est-ce que tu attends ?

Maurepas ne bougea pas. Mantine sut que c'était à son tour d'entrer en scène. Finalement, elle n'était pas côté salle, mais côté loge. Son châle était au bout du lit, elle s’en saisit, et tout en se levant, elle couvrit sa nudité.

- T’en fais de manières depuis que tu reçois des morveux dans ton pieu !

Maurepas n’eut pas le temps de faire le moindre mouvement, les quelques secondes qu’il prit pour hésiter suffirent à Mantine, pour venir se coller tout contre Arturo, lui caresser la poitrine, pour finir par l’embrasser à la commissure de lèvres. Arturo glissa sa main entre les cuisses de Mantine, qui s’éclipsa astucieusement vers la petite cuisine. Le pain était encore sur la paillasse, elle attrapa la saucisse sèche qui pendait à son crochet au-dessus du gaz. Elle fourra le tout dans la musette de Maurepas, elle la lui tendit puis le poussa dehors. Arturo claqua la porte, délassa sa ceinture, coucha Mantine sur le lit et lui arracha son châle.

Maurepas toujours de l’autre côté de la porte, les bras le long du corps, la musette reposant sur le sol, ne savait quelle attitude adopter. Les gémissements de Mantine, lui donnèrent l’inertie nécessaire pour prendre la direction du bar et se payer un bon petit déjeuner aux frais de la princesse. S’il avait attendu un peu, il aurait entendu Mantine hurler de douleur lorsqu’Arturo se mit à jouer avec elle comme avec une poupée à laquelle on peut faire subir tous les sévices. Mais Mantine, dit la Pipette, avait retenu ses cris suffisamment longtemps pour ne pas attirer l’attention de Maurepas (épisode 46).

           Feuilleton publié tous les vendredis et les mardis à 19 heures

prochain épisode vendredi 27 mars 2015

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