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Le voyageur internautique
30 juin 2015

19 heures c'est à nouveau l'heure du feuilleton ! épisode 72

maurepas5 n°72

Les tribulations de Maurepas
Quatrième partie
Vent de terre

Épisode 72 

Une fois sortis du défilé, les quatre voyageurs aperçurent Lasprepont, un petit village fortifié. Maurepas était fourbu, son dos le faisait souffrir atrocement. L'heure avancée de l'après-midi enrobait la route d'une ombre bienfaisante. Les platanes majestueux se dressaient et de leurs bras gigantesques, ils recouvraient enfin la trouée qui s'avançait au pied des monts de la Trésagne.  La voie bien droite avait été tracée par les Romains pour rejoindre les hautes montagnes qui formaient un rempart avant le passage vers le Piérongeais, comté qui faisait frontière. Les chevaux allaient bon train, infatigables. Solange avançait aux côtés de Maurepas, Paille et Petit Pierre sur leur monture légèrement en arrière.

- On fait escale à Lasprepont, les chevaux pourront se rafraîchir et avoir un picotin d'avoine au relais de poste. 

- Les chevaux ne sont pas fatigués. Toi peut-être. 

Maurepas ne releva pas l'ironie, il avait pris sa décision. Il fit un geste du bras en direction des deux autres. Un geste qui désignait l'entrée du village fortifié.

- On repartira au soir. La nuit sera douce, plus propice à la route.

Quelques lieues en amont, après une descente douce, un faux plat prolongeait la route. Les montagnes au loin, la rivière qui roulait au fond des gorges, tout contribuait à créer l'illusion d'une forte inclinaison. Instinctivement, les muscles se raidissaient inutilement pour se préparer à l'effort. La route s'échappait dans le lointain pendant que sur la droite, une arche enjambait la rivière à une hauteur vertigineuse. Les cavaliers s'engagèrent sous la voûte de pierre dont on avait arraché la porte au temps de la révolution. Les saints patrons de la région, eux aussi avait subi le mécontentement du peuple. Les commissaires de la révolution avaient fait buriner les statues qui ornaient la porte. De leur côté, les paysans n'étaient pas très remontés contre les représentants de la chrétienté, ils avaient regardé silencieusement le saccage.

Le passage avait une largeur suffisante pour un gros chariot. Le pont faisait une demie lieue de longueur.  Il se finissait sur ce qui fut un pont-levis. Depuis longtemps, il avait été empierré, seules demeuraient d'énormes chaînes qui grimpaient dans une tour crénelée. Sa forme carrée d'un aspect massif s'élevait suffisamment pour dominer le village.  Une fois passé le porche, on pénétrait dans le village par une cour rectangulaire. Au centre, on avait fait un puits qui plongeait jusqu’à la rivière du Boquet, avant qu'elle ne rejoigne la Girance. Un trépied supportait un système mécanique pour remonter l'eau. Il servait encore pour l'arrosage. Tout autour de la place, se trouvaient les commerces. Au plus prêt, tout contre l’entrée, le maréchal-ferrant avait installé son atelier attenant à une gigantesque grange. Ancienne armurerie plusieurs fois transformée, elle avait fini sa vie en grenier à fourrage. Devant sa forge, debout, habillé d’un tablier en cuir lui descendant jusqu'aux pieds, l'homme observait les arrivants.  Le bruit des sabots sur les pavés annonçait de bien loin ceux qui s'engageaient sur le pont, aussi, il était sorti de son atelier pour assister à l’arrivée du travail probable.  À ses côtés, un drôle de gamin, pas épais, la tignasse en bataille et sale comme un peigne, suivait lui aussi la progression des cavaliers.

- Vous avez là de belles bêtes. C'est pas commun par ci.

Le cheval de Maurepas s'arrêta de lui-même, anticipant le désir de son maître. Maurepas descendit de sa selle, trop content de reposer son dos et son cul qui le faisait souffrir, ce dont il se gardait bien de dire quoi que ce soit. Les trois autres restèrent sur leur monture comme s'ils ne faisaient plus qu'un.

- C'est pas commun de monter à crue  par ci. Et à deux sur son bestiau non plus. Vous allez le tuer à la tâche.  

- Ça ira. Répondit froidement Solange.

- La bête qu'est arrivée en dernier, son fer arrière est fendu. Et l'autre vaut pas mieux.

- Donnez un picotin d'avoine déjà. Et de l'eau.

Le maréchal-ferrant claqua du doigt en direction de son aide. Puis il s'approcha du cheval. Il fit plier la jambe arrière. Le pied était blessé et le fer cassé meurtrissait le sabot. 

- Vous venez d'où ?

- De Saint-Cernin.

L'homme se gratta la tête. Regarda les cavaliers comme s'ils débarquaient de la lune. Puis il observa à nouveau les sabots tous plus usés que normal. 

- Et vos bêtes ont passé par le col des Tranches ?

- Oui, l'autre route, c'est bon pour les trains. Et ça fait passer par l'autre vallée. 

L'homme continuait à étudier les pieds des chevaux, n’en croyant pas ses yeux. L'aide arriva avec l’avoine. Il repartit remplir les baquets avec ses deux seaux.

- C'est pas dieu possible.

Le maréchal-ferrant tenta de faire entrer le cheval de Maurepas. Il se cabra. Et il en fut de même pour les autres.  Le picotin suffit largement à nourrir les trois bêtes. Le pauvre homme n’allait pas gagner grand argent avec ces voyageurs. Il pensa que de toutes les façons, ils n’iraient pas bien loin avec des montures si mal ferrées, des rosses ajouta-t-il dans sa barbe en s’en retournant à son fourneau (épisode 73).

Feuilleton publié tous les vendredis et les mardis à 19 heures

prochain épisode vendredi 3 Juillet 2015

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