S’arrêter… et réfléchir… un peu.
Au nord, pas le moindre mouvement. À l’est rien de nouveau. La route menait vers le Sud, pas une habitation, de la poussière, de ces buissons qui roulent, poussés par le vent et des clôtures en bois. Par endroits. Sinon des barbelés. Il me restait une option. Le soleil glissait sur l’horizon d’un mouvement de ballerine. Un pied qui pointe, l’autre genou à angle droit, talon en avant. Le moteur de la Chrysler Windsor fumait comme une cheminée d’usine. La fille à côté de moi gueulait comme un putois. À coups de démonte-pneu, je l’ai fait taire. Définitivement. J’avais gardé une bière, elle était tiède. Le beurre du sandwich faisait comme de l’huile. Un peu plus loin un arbre. Petit, peut-être un mètre cinquante. Genre pin Bristlecone. Je m’installe à l’ombre. Au fond de ma poche droite, quatre dollars, dans l’autre, plus rien. Elle est trouée. Le soleil roulait sur l’horizon, en furie. Les nuages se déchiquetaient pour s’effilocher dans un ciel d’azur. Le vent continuait de souffler ces ballots de tiges enchevêtrées. Mes Santiags empestaient, les pieds écorchés, elles bâillaient sur le côté extérieur. Une conclusion s’imposait : je n’appartenais plus à ce monde. En fis-je seulement partie ? Rien n’est moins certain.
Maudit blues