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Le voyageur internautique
10 avril 2020

Chronique d’un enfermement : jour 30

Chronique d’un enfermement

La fiction naît-elle quand le réel s’efface ?

accès début (jour3)

enfermement coul

Journée banale d’un confiné. Voilà comment j’aurais pu commencer. Tout d’abord, je vais beaucoup mieux. Juste quelques nausées matinales. Sinon je peux à nouveau me déplacer sans difficulté. Ainsi, j’ai pu faire le fier pour montrer que j’étais en état pour ma sortie nocturne. Pour enfoncer le clou, j’ai fait la vaisselle, étendu le linge, passé l’aspirateur sous le regard étonné de ma femme. « T’es certain que ça va bien ? » Voilà toute la contradiction de ma bien-aimée. D’habitude, je suis effondré sur le canapé, mon journal à la main ou bien regardant des idioties à la télévision nationale et je soulève les pieds quand elle tourne autour de moi. Et là, je participe activement à la vie ménagère, et je passe pour un fou.

J’ai pris des nouvelles du voisin du dessus par notre agent de liaison, le gardien. Aux dernières infos, il est en camp d’internement pour raison de santé. Est-ce lié à l’épidémie ou bien à sa santé mentale, il n’a pas su me dire. Pour lui, c’est la dernière option qui est la bonne. Il m’a précisé que le brave homme n’allait pas très bien depuis longtemps déjà. Il passait le plus clair de son temps à organiser le contenu des poubelles en classant les déchets des plus petits aux plus grands afin de gagner de la place.  « J’ai eu beau lui expliquer que ça ne servait à rien, il n’a cessé que le jour du confinement. » J’ai appris qu’il voulait aussi repeindre les portes d’accès aux caves et au parking, d’où la présence de coups de pinceaux énigmatiques formant des carrés blancs un peu partout.

Nous avons parlé émeutes. Il m’a expliqué qu’il n’avait pas plus d’informations que la veille, car le cousin de sa femme est de repos. Mais pour lui, ça ne s’arrange pas, les miliciens sont sur les dents. En ce qui me concerne, le point positif, c’est qu’ils sont occupés ailleurs, je vais pouvoir me faufiler discrètement jusqu’à la maison de Nour. J’ai remarqué que je ne disais plus « baraque » ou « bicoque ». Dans mon esprit, c’était devenu une petite maison où il faisait bon vivre. Malgré le côté spartiate, elle a réussi à créer un environnement agréable. On s’y sent bien. Je sais que cela peut paraître mesquin de ma part d’affirmer une chose pareille, moi qui possède un appartement de quatre pièces pour nous deux. Mais j’y retrouve une atmosphère commune qui donne envie de s’asseoir pour un moment de tranquillité.

Le soleil flirtait avec l’horizon, il était temps que je me prépare. J’ai décidé d’enfiler une tenue sombre. J’ai abandonné la veste fluo pour l’autre, entièrement noire. Le pantalon de vélo l’est aussi, ainsi que les gants. Au lieu de prendre mes chaussures de vélo, j’ai opté pour des baskets anthracite, mais avec un liseré rouge qui détonait dans l’uniforme. On aurait dit un Ninja, manquait plus que le sabre et le bandana. Ma femme n’était toujours pas d’accord, elle a même fait appel à la voisine pour me convaincre. Mais j’étais fermement résolu à me rendre chez Nour. « Je veux savoir comment elle va ! » ai-je prétexté. En réalité, j’avais besoin de revoir toutes ces personnes que j’avais côtoyées tout au plus une partie de la journée.

Vers 22 heures, j’ai décampé sous le regard inquiet de ma tendre épouse. La route était éclairée par une pleine lune insolente. C’était bien ma veine. Pas un nuage. J’ai remonté la rue qui passe devant chez moi. Heureusement, j’ai réagi à temps, le bout était barré par la milice. Je pensais qu’ils ne m’avaient pas aperçu, je suis monté sur le trottoir et j’ai tenté ma chance par le petit parc. J’ai filé à bonne allure sous une douche de lumière déversée par l’éclairage public. C’est à cause des agressions. En prenant le sentier de terre qui longe la voie de chemin de fer, j’ai choisi de rouler dans l’ombre des arbres et l’absence d’éclairage. A partir de là, je pouvais regagner l’avenue et passer par le centre-ville.

Si j’avais su, je serais descendu de mon vélo pour m’avancer à pied et voir si la route était dégagée. Trois types me sont tombé dessus et m’ont jeté à bas de mon vélo. Lorsque je me suis relevé, j’ai compris que les miliciens m’avaient aperçu au loin, les coquins avaient fait le tour !

Jour 31

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